Article préparé par Maud Cazaux
Nous tenons à remercier Serge Jaumain pour son implication dans cette soirée ainsi que notre public, que nous invitons à nous rejoindre ce soir pour la projection de Batallas Intimas, qui sera suivie d’un débat avec la réalisatrice Lucía Gajá!
Le mardi 8 Octobre, s’est déroulée la deuxième soirée du Festival de documentaires engagés dans les Amériques, au cinéma Le studio à Aubervilliers avec la projection du film La fin des terres du jeune réalisateur québécois Loïs Darses. Lors de la présentation, les doctorantes Laura Cahier et Alice Langlois ont tout d’abord souligné le lien entre esthétique et politique dans les films sélectionnés pour cette édition. En effet, ces films qui travaillent des thématiques sociétales et environnementales, interrogent à travers des dispositifs filmiques variés les possibilités d’agir et de lutter. Ainsi, le film projeté lors de cette soirée, La fin des terres, de Loïc Darses, interroge l’impasse politique dans laquelle se trouve le Québec autour des problématiques de l’autonomie du pays, de l’environnement et des questions autochtones.
Pour développer ces thématiques et présenter les enjeux de ce documentaire dans le contexte canadien contemporain, le festival a invité Mr Serge Jaumain, professeur en Histoire contemporaine à L’Université Libre de Bruxelles, dont les travaux portent notamment sur les relations Canada-Europe.
La fin des terres, propose 17 témoignages de jeunes québécois.e.s qui exposent par un récit en voix-off leur vision du Québec actuel. Leur récit qui revisite la question de l’identité en la liant au territoire se cristallise autour d’un événement majeur dans l’histoire du Québec contemporain : le référendum de 1995. Celui-ci a vu le projet d’indépendance du Québec échouer par un vote négatif et représente ainsi un moment de rupture dans l’histoire québécoise. Serge Jaumain, précise que ces témoignages évoquent un autre référendum celui de 1980 qui avait aussi refusé l’indépendance du territoire à 60%. Il spécifie alors qu’à partir des années 1960, le Québec a connu une période libérale et une augmentation des richesses. Cette période appelée « la révolution tranquille » a été un moment de transformation du Québec où le pouvoir clérical a diminué. C’est à ce moment-là qu’un rapport au nationalisme, plutôt de gauche s’est développé. Ce mouvement prend alors de l’ampleur jusqu’au moment du référendum que le parti pensait gagner. Depuis lors, les gouvernements essayent de trouver des solutions alors que les propositions sont rejetées par les québécois.
Dans La fin des terres, le récit de ces jeunes adultes qui n’ont pas voté ou connu ce référendum, expose la difficulté pour la jeunesse de se situer dans un débat à la fois identitaire, culturel et politique qui découle de cette situation instable. Les questions liées à « un ancien monde » et celle de la transition vers un autre avenir reflètent les sentiments de la jeunesse tiraillée entre l’appartenance à un territoire et une identité et le rejet d’une politique qui a décimé les autochtones et leur culture.
A la suite de la projection, une spectatrice fait part de son intérêt pour le dispositif filmique qui entremêle aux multiples voix-off, des plans urbains et de paysages vidés de toute présence humaine. Par ce montage, le réalisateur soumet les images au discours et nous amène à écouter avec attention ces témoignages. L’homogénéité portée par le discours a été interrogée par le public. A ce sujet, Serge Jaumain précise que cette forme de consensus dans le discours des jeunes n’est pas représentative de toute la jeunesse québécoise, mais plutôt celle d’une classe privilégiée et/ou intellectuelle. Enfin, pour l’historien, le film La fin des terres soulève la singularité de la problématique identitaire du Québec où l’attachement à une identité nationale se veut inclusive et ouverte.