El juego de Cuba par Manuel Martín Cuenca : du Paradis perdu au désenchantement[1]
Par Nancy Berthier (Sorbonne Université, CRIMIC EA 2561) et Marianne Bloch-Robin, (Sorbonne Université, CRIMIC EA 2561)
Traduction de l’espagnol : Véronique Pugibet (Sorbonne Université, CRIMIC EA 2561)
Pour les réalisateurs et réalisatrices de la génération des baby-boomers, Cuba signifiait au début des années 1960 l’avènement d’une révolution différente, menée par des hommes barbus qui allaient rendre possible la naissance d’un « homme nouveau » et d’un monde nouveau. Plusieurs décennies plus tard, en 2001, c’est cette même révolution que Manuel Martín Cuenca[2] choisit de dépeindre, mais avec le regard distancié de la génération suivante –la fameuse génération X–, dans son documentaire, El juego de Cuba. Ce premier long métrage nous semble représentatif de toute une génération qui aborde l’art non plus dans la tradition de « l’engagement » au sens sartrien du terme, un engagement qui prétendait changer le monde[3], mais dans le cadre d’un d’engagement plus réflexif et, finalement, plus prosaïque, qui tente de penser le monde à partir d’un regard mêlant fascination, critique, désenchantement et nostalgie. En d’autres termes, comment penser le Paradis à l’aube du nouveau millénaire alors qu’il est perdu et bel et bien perdu ? C’est la ligne qui guidera notre analyse de El juego de Cuba. A partir d’une « fonction documentaire » classique (qui consiste à documenter une réalité), le film présente également une « fonction poétique » qui correspond à une esthétique propre, dont nous soulignerons les principaux traits avant d’aborder ce qui nous donne finalement la clé de ce documentaire, une fonction « spéculaire », le réalisateur se projetant dans son œuvre[4]. La combinaison de ces trois fonctions nous permettra de caractériser ce premier film de Manuel Martín Cuenca et de l’insérer non seulement dans son époque mais aussi dans l’histoire du cinéma documentaire.
La fonction documentaire
Nous appelons fonction documentaire au cinéma la manière dont un film est lié à une réalité représentée dans un but informatif ou didactique. En ce sens, la fonction documentaire n’est pas spécifique au documentaire (ou, si l’on veut, au cinéma de non-fiction) mais elle concerne tout film qui choisit de documenter une réalité, qu’elle soit contemporaine ou passée. Dans une certaine mesure, tout film, en raison de la nature « indicielle » même de l’art cinématographique, remplit une fonction documentaire. Toutefois, cette dimension peut être plus ou moins revendiquée et œuvrer de manière plus ou moins centrale dans le dispositif filmique. En effet, il s’agit d’une fonction qui a été déterminante dans l’histoire du film documentaire et qui s’est même imposée comme l’une des caractéristiques du genre. Elle ressort par exemple de la définition du documentaire donnée par Michel Marie et Jacques Aumont dans leur dictionnaire théorique du cinéma : « L’opposition documentaire/fiction est l’une des grandes lignes de partage qui structurent l’institution cinématographique depuis ses origines […]. Un montage cinématographique d’images visuelles et sonores données comme réelles et non fictionnelles est appelé […] documentaire. Le film documentaire a toujours un caractère didactique ou informatif dont l’objectif principal est de restituer les apparences de la réalité, de montrer les choses et le monde tels qu’ils sont »[5].
Dans le cas du film El juego de Cuba, réalisé par Manuel Martín Cuenca à la fin des années 1990 et sorti en 2001[6], la fonction documentaire est sans doute le point de départ du projet du cinéaste. Invité à passer quelque temps à Cuba, à l’école de cinéma de San Antonio de los Baños, le réalisateur est confronté à une réalité politique et socioculturelle singulière, celle de la Révolution cubaine.
Le cinéaste décide de rendre compte de la réalité cubaine dans laquelle il a été plongé à travers l’un des aspects qui lui semble le plus pertinent, le baseball, qui, à partir du moment où il a été importé des États-Unis à l’époque coloniale, est devenu le sport national par excellence. Comme il n’existe aucun film sur ce sujet, ni à Cuba ni en dehors de l’île, le réalisateur a choisi de le documenter par un intense travail de recherche non seulement à Cuba mais aussi en dehors du pays. Ce travail de recherche constitue la base du travail ultérieur de montage.
La fonction documentaire peut être divisée en trois niveaux principaux –l’histoire, la mémoire et le reportage–, qui correspondent à des approches différentes de la réalité traitée. Le cinéaste recherche tout d’abord des documents qui lui permettent de donner à son film une dimension historique. À partir de nombreuses archives cinématographiques, photographiques et de presse, patiemment collectées dans diverses parties du monde (La Havane, Miami, Madrid, New York), il offre au spectateur un panorama de l’évolution de ce sport depuis son introduction dans le pays jusqu’à la période contemporaine (photographies, articles de presse, fragments de documentaires, lettres, publicités, trouvés à la bibliothèque nationale de Madrid, à l’ICAIC, à l’université de Yale, etc.) Il s’agit d’une forme assez traditionnelle de la fonction documentaire. Il choisit également de les présenter de manière classique, en commençant par un montage visuel de ces documents, qu’une voix off, interprétée par la célèbre actrice espagnole Mercedes Sampietro, commente sur un ton neutre. L’intention didactique du cinéaste est évidente dans ce choix.
À cette approche du baseball en termes d’histoire se superpose une approche en termes de mémoire, tout aussi importante que la première, et qui alterne avec elle. En effet, le cinéaste ne s’est pas contenté d’exhumer les traces du passé, il est également parti à la recherche de témoins privilégiés pour les interviewer, exposant ainsi la « mémoire » –ou plutôt les souvenirs– du baseball. Des dizaines de témoins défilent devant la caméra, non seulement les joueurs du sport eux-mêmes (les « ballplayers ») mais aussi des hommes politiques, des chercheurs ou simplement des figures de la vie culturelle du pays : l’acteur Jorge Perugorría, l’écrivain Leonardo Padura, le cinéaste Daniel Díaz Torres, le ministre des sports Humberto Rodríguez, le journaliste Joaquín Ortega, le professeur de philosophie Ariel Hidalgo, des musiciens, etc. S’ajoutent à la liste, des personnalités étatsuniennes telles que le journaliste de Miami Sarvelio del Valle, le député Robert Menéndez ou le professeur de l’université de Yale Roberto G. Echevarria. Les entretiens avec les joueurs de baseball documentent l’histoire de ce sport en se fondant sur un certain nombre de destins particuliers qui la mettent en perspective. Plusieurs générations se croisent, représentant différentes étapes de cette histoire et introduisant une vision plus intime du sport, conformément à l’intention du réalisateur de « capter les aspects humains et émotionnels du jeu » au lieu de « faire une histoire technique de la balle »[7] : Genaro Melero, Mario Fajo, Curro Pérez, Alfredo Street, Toni González, etc. se succèdent dans le film. Le cinéaste fait sortir de l’oubli les acteurs plus anciens ou ceux qui ont été écartés de l’histoire officielle à certains moments. Il propose un échantillon qui ne prétend pas être exhaustif mais simplement représentatif. La présence des témoins permet d’offrir une vision du sport qui va bien au-delà de sa dimension strictement sportive dans la mesure où, comme le commente le directeur, « la balle a été le grand canalisateur des émotions du pays »[8]. L’introduction régulière de cette galerie de portraits tout au long du film complète le montage des documents d’archives, créant un rythme alterné.
Enfin, l’approche documentaire s’enrichit d’un troisième niveau, celui du reportage. En effet, le principal fil conducteur du film est la présentation de deux matchs amicaux entre les Orioles de Baltimore et l’équipe nationale cubaine, d’abord à La Havane le 28 mars 1999, puis aux États-Unis le 3 mai, un véritable événement historique dans la mesure où aucune équipe de la Major League n’avait joué dans le stade de La Havane depuis environ 40 ans[9]. L’évocation de cette partie sous forme de reportage[10], à différents moments du film, ajoute aux deux niveaux précédents une fonction documentaire ancrée dans le présent qui permet, somme toute, d’offrir une vision multiforme du phénomène au moment de la réalisation du film, entre la fin des années 1990 et le début des années 2000. Selon le réalisateur, « la structure du scénario vise à établir une relation entre le présent (les deux matchs entre les Orioles et Cuba) et le passé, en utilisant le flash-back comme fil conducteur ». Le reportage est intégré aux deux autres niveaux, et les trois forment un tout. La présence des trois niveaux, obéissant chacun de manière différente à la fonction documentaire, multiplie les points de vue sur l’histoire et la nature du baseball à Cuba. Mais si le baseball cubain est évidemment le sujet essentiel du film et l’objet principal de la fonction documentaire, il recoupe en même temps un autre grand sujet qui lui donne son intérêt propre et qui fait que la fonction documentaire n’a rien à voir avec un didactisme classique qui consisterait simplement à nous faire connaître l’histoire et les lois de ce sport. Ce que le cinéaste appelle dans le titre simplement « le jeu de Cuba » lui fournit en réalité un moyen d’accéder à une autre réalité, beaucoup plus vaste, la révolution cubaine et à travers elle, raconter l’histoire d’un peuple qui a vécu sous le regard du monde pendant les quarante dernières années »[11]. En plongeant le spectateur dans son histoire, il met en évidence le fait que, depuis ses débuts dans le pays, ce jeu a joué un rôle socio-politique en tant que moyen d’opposition à la domination coloniale. À partir de là, ce sport s’est inscrit à Cuba dans un imaginaire national de résistance et d’affirmation de sa propre identité : « Bien qu’ils l’aient importé des États-Unis il y a plus d’un siècle et demi, ils en ont fait peu à peu un élément fondamental de leur identité. Le baseball […] a été le principal catalyseur des émotions du pays, de ses vertus et de ses défauts, de ses rêves et de ses ambitions »[12]. Mais c’est surtout à partir du moment où les révolutionnaires prennent le pouvoir sur l’île que le baseball prend cette dimension, et c’est d’ailleurs la période à laquelle le film consacre le plus de temps, devenant, de manière sous-jacente, un film sur la révolution. L’histoire du baseball se confond par la suite avec l’histoire de la révolution cubaine et notamment de sa colonne vertébrale, la relation d’opposition entre l’île et son voisin étasunien[13]. Ce que le film documente réellement, ce sont les composantes et le développement de cette « drôle de guerre ». La chronologie de l’histoire du baseball racontée par Manuel Martín Cuenca est calquée sur la chronologie des relations conflictuelles entre les deux nations : la période de nationalisation des grandes entreprises et l’embargo qui suivit, l’invasion de la Baie des Cochons, la crise des missiles, l’échec de la Zafra dans les années 1970, l’exode de Mariel dans les années 1980 et la période spéciale des années 1990. Les trois niveaux de la fonction documentaire que nous avons mis en évidence ci-dessus s’inscrivent chacun à leur manière dans cette perspective[14].
Si la fonction documentaire de El juego de Cuba, à travers l’histoire, la mémoire et l’actualité tant du baseball que de la révolution cubaine, est fondamentale pour le film, elle ne s’y limite pas pour autant et elle est complétée par la fonction que nous appelons « poétique » (du grec poiêsis, création), son pôle opposé, impliquant un acte de création et qui se découvre grâce à divers procédés narratifs et esthétiques.
La fonction poétique
En effet, la fonction poétique de ce documentaire, à première vue assez classique dans sa forme, traduit la vision particulière du cinéaste, révélant sa condition de véritable auteur à travers un regard complexe qui oscille entre plusieurs pôles qui peuvent sembler opposés mais qui sont caractéristiques de la génération à laquelle il appartient : l’enthousiasme, la nostalgie et le désenchantement.
Le double récit qui structure l’ensemble du film est une première illustration de ce regard complexe et ambigu. En effet le premier récit, chronologique, retranscrit la longue histoire du baseball cubain depuis le milieu du XIXe siècle. À travers ce prisme, l’histoire de l’île est reflétée depuis un mouvement de libération jubilatoire jusqu’à la désillusion de la fin du XXe siècle. En effet, après les vingt premières minutes qui rappellent les racines profondes du jeu à Cuba, la description de la décadence et de la corruption des années 1950 pendant la dictature de Batista sont soulignées par l’une des interventions de la voix off de Mercedes Sampietro qui mettra en évidence par la suite l’élan de la naissance de la révolution. Le film fait de l’utopie du baseball non professionnel une métonymie du mouvement enthousiaste des débuts de la révolution : les joueurs deviennent alors de véritables héros désintéressés puisqu’ils sont à peine payés, mais se consacrent pleinement à leur sport. Cependant, le merveilleux enthousiasme des joueurs de base-ball –comme celui de la révolution cubaine– s’assombrit progressivement au fil du temps : accusations de corruption de plusieurs des joueurs à qui l’on interdit de rejouer, énormes difficultés d’approvisionnement lors de la période spéciale, et enfin l’exode de plusieurs des meilleurs membres de l’équipe cubaine vers les États-Unis. Dans ce premier récit, on peut donc constater une désillusion progressive mêlée au regret et à la nostalgie d’un temps perdu, celui de l’innocence et de l’enthousiasme, où tout semblait possible sur l’île. En outre, le récit repose principalement sur des interviews de joueurs de baseball et de témoins qui évoquent ce passé débordant d’espoir.
Le deuxième récit (le reportage sur le match des Orioles) tempère, dans une certaine mesure, la déception qui se dégage de la première. Il s’agit de ce que l’on pourrait appeler une double méta-narration, dans les deux sens du terme[15], puisqu’il s’agit d’une part d’un deuxième niveau narratif par rapport à l’histoire principale. D’autre part, elle peut aussi être décryptée comme la réinterprétation d’un des grands récits fondateurs : la lutte de David (l’équipe cubaine) contre Goliath (l’équipe américaine). En effet, si les joueurs cubains perdent le premier match contre les Orioles de Baltimore, ils sont les gagnants du deuxième match aux États-Unis. Les trois retransmissions d’images des matchs permettent de créer chez le spectateur une attente, un suspense en raison de l’incertitude de l’issue des matchs et des nombreux obstacles que l’équipe cubaine doit surmonter pour jouer et gagner. Ce suspense crée une tension dramatique dans laquelle tous les éléments narratifs et esthétiques (musique, images d’enthousiasme et d’espoir des spectateurs, voix off) visent à ce que le spectateur adopte le point de vue des Cubains : logiquement celui de David contre Goliath. Cette histoire revisite ainsi les grands métarécits que la postmodernité a écartés et donne à l’ensemble de l’œuvre une qualité presque épique. Cet élan insuffle et reflète un enthousiasme –et une fascination de la part du réalisateur– qui compense en partie la désillusion qui s’empare progressivement du premier récit et semble témoigner de la permanence de la lutte et de la résistance révolutionnaire à la pression écrasante du géant étasunien, malgré tous les obstacles.
Parallèlement à ces procédés narratifs, la fonction poétique du film est également renforcée par la galerie de portraits des joueurs de base-ball –même si des témoins de diverses natures sont également impliqués– de la mémoire des plus anciens aux dilemmes posés par les plus jeunes. Le cadrage utilisé pour les interviews, presque toujours en plan rapproché, permet de concentrer l’attention du spectateur sur les expressions des visages des joueurs[16]. Il convient de noter que les témoignages des sportifs figurant dans le film ont été soigneusement sélectionnés parmi de nombreux autres. Leur humanité et leurs personnalités constituent une galerie de portraits fascinante pour le spectateur. Par ailleurs, la caméra cadre les joueurs, presque toujours de façon excentrés sur un côté du champ, peut-être dans une traduction esthétique de la complexité de leur position dans la société cubaine : anciens champions oubliés, joueurs discrédités ou exilés aux États-Unis… La profondeur de champ, qui varie selon les interviews, permet souvent de distinguer quelques éléments significatifs de l’intérieur et de la décoration des maisons des témoins qui les caractérisent : leurs souvenirs –principalement des photos– mais aussi des objets qui révèlent leur statut économique. Les maisons modestes, simples et dignes des sportifs restés sur place contrastent avec le luxe des résidences haut de gamme des exilés. Cependant, il n’y a aucune trace de manichéisme dans la vision de l’auteur qui a choisi des personnalités –aussi bien celles de l’intérieur que celles de l’extérieur– dotées de qualités humaines et qui n’adoptent pas une position radicale dans leurs discours, respectant toujours la position des autres, tout en justifiant la leur.
Un autre élément important de la fonction poétique réside dans l’utilisation récurrente de plans non directement justifiés par le récit filmique. Il s’agit souvent de plans fixes : plans généraux de La Havane, plans de stades vides, d’installations sportives, plans du drapeau cubain flottant au vent. La composition plastique de ces clichés est extrêmement soignée et ils montrent presque toujours des lieux dépourvus de toute présence humaine. Ce sont des plans que l’on peut qualifier de descriptifs[17], ils suspendent le temps de la narration en introduisant une pause dans l’histoire. Ils correspondent à la définition du Pillow-Shot, une expression créée par Noel Burch[18] à propos des films de Yasujiro Ozu et qui désigne des plans qui ne sont pas strictement nécessaires du point de vue de la mécanique narrative et dont les principales caractéristiques sont la suspension du flux diégétique, l’immobilité, l’exclusion de la présence humaine (c’est pourquoi certains chercheurs les appellent natures mortes ou même plans vides[19]) et l’importance de leur composition plastique. La relation de ces plans avec la diégèse peut être de plusieurs ordres et notamment ils peuvent annoncer métaphoriquement certains thèmes du film[20].
Ces caractéristiques correspondent parfaitement aux plans introduits par Manuel Martín Cuenca dans son œuvre. L’un des éléments à souligner, outre la composition plastique, est l’exclusion de la présence humaine : absolue dans le cas des installations sportives et nécessairement partielle dans les plans généraux de la ville, filmés à l’aube. Selon Yvette Biro[21], dans les films d’Ozu, l’exclusion de toute présence humaine permet à ces plans d’exprimer et de traduire le passage inéluctable du temps par la contemplation du vide. Aussi éloignés que soient les univers filmiques d’Ozu et de Martín Cuenca, la conscience du passage du temps est évidente dans les pillow-shots de El juego de Cuba, puisque, par exemple, les plans des stades vides précèdent ou devancent souvent les témoignages des joueurs de baseball, évoquant des temps révolus. L’un des pillow-shots (TC : 13mn 03s)[22] montrant les tribunes vides d’un stade est même associé à une photo en noir et blanc (autre témoignage du passage du temps) montrant le même endroit bondé de spectateurs. Beaucoup de ces plans représentent des lieux qui peuvent être considérés comme des traces du passé évoqué et qui sont la synecdoque de l’histoire du baseball, comme l’histoire du baseball elle-même est la synecdoque de l’histoire de Cuba. Une fois encore, ces plans ambigus se prêtent à une double interprétation. Leur absence, en révélant le passage du temps, peut être une évocation nostalgique de ces temps d’espoir où l’enthousiasme révolutionnaire semblait capable de tout, mais aussi du désenchantement d’une utopie frustrée et ratée.
Le dernier élément que nous mettrons en avant pour illustrer la fonction poétique est l’utilisation de la musique. En effet, tout au long du film, de nombreuses mélodies cubaines sont utilisées, des chansons en particulier, à la fois en off et en in, avec la présence, à l’écran, de chanteurs cubains. Ces interventions musicales sont toutes significatives, mais nous nous concentrerons ici sur les occurrences de deux chansons dont le rôle dans le récit filmique nous semble très pertinent. Le premier, chanté et composé par l’auteur-compositeur cubain Silvio Rodríguez en 1969, s’intitule Cuando digo futuro et le second Esta vez tocó perder est un bambuco interprété par la célèbre chanteuse María Teresa Vera qui a composé la musique en 1914 tandis que les paroles sont d’Emma Núñez. La version utilisée dans le film est l’enregistrement des années 1950 d’un duo avec Lorenzo Hierrezuelo. Ces deux chansons illustrent également l’approche polysémique de la réalité cubaine par le réalisateur.
En effet, la première chanson, avec un texte engagé qui invite à plusieurs reprises à croire en l’avenir, est associée à des images d’archives des années 1960 qui montrent l’enthousiasme des Cubains à construire l’utopie révolutionnaire[23]. Les images montrent de jeunes Cubains, pleins de joie, allant dans les zones rurales pour alphabétiser les populations. Les gens – pour la plupart très jeunes – rient, dansent, jouent, semblent heureux et pleins d’enthousiasme. La chanson fonctionne comme un commentaire des images et elle unifie en outre plusieurs plans hétérogènes en une seule unité narrative, une parenthèse heureuse et pleine d’espoir. Le refrain avec la répétition du mot « cree » (« crois ») associé à « futuro » (« avenir») synthétise bien l’état d’esprit de nombreux Cubains à cette époque. Plusieurs éléments contribuent à la nostalgie qui se dégage de cette séquence : le style de la musique, qui rappelle les années soixante, la voix jeune et enthousiaste du chanteur, et le texte qui, en utilisant le tú et le yo « Te convido a creerme cuando digo futuro » (« Je t’invite à me croire quand je dis avenir »), interpelle directement l’auditeur dans un appel émotionnel, éveillant en lui la nostalgie de cet âge d’or.
En revanche, la chanson déchirante de María Teresa Vega, chantée par deux voix âgées, clôt le film dans un propos désenchanté qui, associé au générique de fin, semble révéler le point de vue de l’énonciateur filmique. Le retentissant « Cette fois-ci c’était notre tour de perdre » commence d’ailleurs juste après la diffusion des images d’un Fidel Castro qui tient à peine debout –peut-être une métaphore de la société cubaine– mais qui prononce avec difficulté un dérisoire « nous allons gagner, c’est certain » (TC : 1h 31mn 13s). Un gros plan sur un drapeau cubain laisse apparaître un très lent fondu enchaîné d’un plan général de la mer et l’inscription « À tous les joueurs de baseball cubains » La chanson se poursuit jusqu’à la fin du film, concluant « Je sais que cela va me coûter cher / Mais je me résignerai / À ma fierté je dirai / Comme à mon cœur / On ne peut pas toujours gagner / Cette fois, c’était mon tour de perdre »[24], en contrepoint de la victoire contre les Orioles, qui perd soudain son aura épique de méta-narration fondatrice pour devenir ce qu’elle est vraiment : un match de baseball qui ne changera pas le cours de l’histoire cubaine.
La fonction spéculaire
Ce que nous appelons la « fonction spéculaire » fait référence à la manière dont un cinéaste se projette dans son œuvre, s’y regarde, comme dans un miroir et s’interroge sur lui-même. Cette fonction, si elle est opérante dans tous les films, se présente de manière plus ou moins transparente, sur une échelle allant du plus intime (dans les films clairement autobiographiques) au plus lointain (un film de commande, par exemple). Bien que chaque film ait un rapport particulier à la fonction spéculaire, plus ou moins clair, qu’il faut rechercher dans son histoire particulière, on peut observer certaines tendances : elle est généralement plus présente dans les films d’auteur que dans les films commerciaux, parfois moins évidente dans les documentaires que dans les fictions. Dans les premiers films, la fonction spéculaire nous semble particulièrement importante. En effet, dans une première œuvre, les cinéastes mettent généralement tout ce qui leur semble essentiel, à tous les niveaux (thématique, esthétique, vision du monde, etc.). En soi, la réalisation d’un long métrage est un processus de longue haleine, mais dans le cas d’un premier film, s’ajoute le défi de devenir un cinéaste. Analyser la fonction spéculaire d’un premier long métrage, ce n’est pas seulement découvrir le pourquoi d’un film, mais cette approche peut aussi permettre de révéler un point de vue cinématographique fournissant des clés d’interprétation pour l’œuvre ultérieure.
Dans le cas du film El juego de Cuba, la fonction spéculaire n’est pas a priori évidente. Le réalisateur avoue s’intéresser au sport : « J’aime le sport, les lieux où les gens se rassemblent […] un jour je suis allé voir un match de baseball au lieu d’aller dans l’atelier d’un peintre bohème et j’ai été fasciné »[25]. Cependant, au vu de sa filmographie ultérieure (et aussi de ses premiers courts métrages), on ne peut pas dire qu’il s’agisse d’un thème où il se projette particulièrement : La flaqueza del bolchevique (2003) traite de la fascination d’un homme mûr pour une jeune fille, Malas temporadas (2005) est un film choral où se croisent les destins de personnages en exil intérieur ou extérieur, Últimos testigos : Carrillo comunista (2008) est un documentaire sur le leader communiste espagnol et enfin une dernière fiction La mitad de Óscar (2010) raconte un amour impossible entre un frère et une sœur.
Quant à la thématique parallèle, la révolution cubaine, si le cinéaste a effectivement séjourné à Cuba, élément important dans sa formation personnelle et professionnelle, on ne peut pas dire non plus qu’il ait une relation privilégiée avec ce pays. Bien sûr, il s’y intéresse beaucoup, comme il l’a indiqué à plusieurs reprises, mais de très loin : il n’y a pas participé, bien sûr, ni ses proches, et sa position ne correspond pas aux lignes directrices classiques du militantisme politique, que ce soit pour ou contre.
En réalité, la fonction spéculaire dans El juego de Cuba est indirecte, mais pas moins importante pour autant. Ce qui s’y joue n’est pas une autobiographie transparente, mais plutôt un positionnement générationnel, à un double niveau. Tout d’abord, en ce qui concerne son sujet, la révolution cubaine, qui était le grand sujet des générations précédentes, notamment des baby-boomers. Les jeunes des années 60 –adolescents au moment du triomphe de la révolution cubaine– ont eu l’occasion de vivre l’apogée des derniers métarécits militants. La génération suivante, à laquelle appartient Martín Cuenca, éloquemment appelée « génération X », n’a eu jusqu’à présent qu’à assister au déclin de ces métanarrations.
La génération X –ou, selon les deux auteurs américains William Strauss et Neil Howe, la treizième génération, – à laquelle appartient le réalisateur d’Almería et que Nancy Smith définit comme « La génération d’après, née après 1960, après vous, après que tout soit arrivé » [26], a connu dans son ensemble, une évolution de sa position idéologique au fil du temps. Dans sa jeunesse, marquée par l’échec des grandes utopies et par la crise économique, elle a adopté une certaine distance –voire une certaine indifférence– vis-à-vis des luttes idéologiques. Cependant, avec le temps, cette attitude pragmatique et distanciée est devenue, dans certains cas, un outil au service d’une analyse réfléchie et dépassionnée du monde et du passé. C’est cette position que traduit la déclaration du réalisateur espagnol lui-même, qui, soit dit en passant, était d’avis que son œuvre n’allait plaire ni aux partisans de Castro ni aux exilés cubains : « J’ai essayé de maintenir une perspective sur la révolution cubaine, mais en évitant les attitudes partisanes »[27].
Par ailleurs, pour Martín Cuenca, le positionnement générationnel se fait par rapport à l’histoire du cinéma. Si la fin des années quatre-vingt-dix et le début du deuxième millénaire ont connu un essor sans précédent du cinéma documentaire, pour ceux qui, au début des années 2000, ont commencé leur carrière cinématographique par un documentaire, la grande tradition de ce genre est à chercher dans le cinéma des générations précédentes, dans les années soixante, dans le cadre d’un cinéma engagé dans l’évolution des réalités sociopolitiques.
Cette période des années 1960 correspond à un développement de documentaires politiquement engagés, souvent de nature épique, dans la tradition de l’ «engagement» qui a marqué l’histoire du septième art. En particulier, nombreux sont les réalisateurs qui, dans le contexte de l’effervescence sociopolitique et culturelle précédant mai 1968, ont dépeint une révolution qui se présentait comme porteuse d’un avenir plein d’espoir. La révolution cubaine a non seulement inspiré les cinéastes cubains, stimulés par une politique volontariste du nouvel État en matière de création cinématographique[28], mais aussi de nombreux étrangers qui ont entrepris ce qui s’apparentait à un nouveau type de pèlerinage, le voyage sur l’île pour collecter des images qui allaient nourrir leur imaginaire cinématographique[29].
Le positionnement générationnel de Manuel Martín Cuenca est nécessairement ambivalent, comme en témoigne la fonction poétique de son œuvre. D’une part, cela signifie suivre les traces des autres, sentir parfois le souffle épique de l’histoire, s’enthousiasmer. Mais à d’autres moments, c’est le présent amer qui s’impose, reflétant le grand vide de la réalité des représentants de la génération X, à qui tout avenir prometteur est interdit. La position de Manuel Martín Cuenca dans ce film sur la révolution cubaine est, dans une certaine mesure, celle de toute une génération privée de rêves par l’échec des rêves des autres. Une position à la fois mélancolique et fascinée.
Pour son deuxième documentaire, le réalisateur originaire d’Almeria a poursuivi la même réflexion, mais un peu plus près de sa propre histoire, puisqu’il l’a consacrée à la figure de Santiago Carrillo, le leader communiste espagnol qui a joué un rôle de premier plan dans la transition politique en Espagne. La fonction spéculaire s’est révélée plus clairement dans la mesure où, avec la biographie du célèbre homme politique espagnol, c’est sur le sol ibérique même que la « grande histoire » s’est déroulée. La vision de Manuel Martín Cuenca dans Últimos testigos : Fraga y Carrillo (2008)[30] présente la même ambivalence que dans El juego de Cuba, partagée entre une fascination incontestable devant le destin exceptionnel de cet homme, mêlée à la nostalgie des années de lutte, et une distance critique marquée par la volonté inquisitrice de l’intervieweur[31].
D’un point de vue générationnel dans le cadre du cinéma, ce premier film naît dans une période d’essor du genre documentaire en Espagne avec des caractéristiques communes que Jaime Camino définit comme un genre « de plus en plus vivant qui est encore déterminé à sauver de l’oubli des épisodes de l’histoire, des problèmes sociaux et politiques ou simplement à devenir le médium idéal pour raconter la réalité quotidienne avec la même capacité d’émouvoir, de faire vibrer et de fasciner que les films de fiction »[32]. José Luis Guerin, Jaime Camino, Javier Riojo ou José Luis López-Linares sont des réalisateurs dont l’engagement envers la société est plus réfléchi et plus distancé que l’engagement idéaliste des cinéastes des années 1960. Il convient de noter qu’en 2001, lorsqu’un prix Goya spécial consacré aux films documentaires a été créé, parmi les nommés figuraient des films aussi importants que En construcción de José Luis Guerin, Los niños de Rusia de Jaime Camino ou Caminante de Fernando León de Aranoa, un réalisateur espagnol qui s’est intéressé à un autre mouvement révolutionnaire latino-américain: le zapatisme. Et bien évidemment, il y avait aussi El juego de Cuba de Manuel Martín Cuenca[33].
Un parallèle peut être établi entre le film de Martín Cuenca et celui de Fernando León de Aranoa, quant à leurs points de vue respectifs. En effet, si le premier s’intéresse à la révolution cubaine à travers le prisme du baseball, le second s’intéresse aux habitants d’un village du Chiapas et à leurs préparatifs pour accueillir l’armée zapatiste qui passera par là lors de sa marche vers Mexico. Dans les deux cas, les réalisateurs montrent une volonté de traiter l’histoire de manière indirecte, par le biais de micro-récits –puisque les métarécits appartiennent déjà à un autre temps– : pour sauver l’histoire de nombreux joueurs de baseball oubliés ou pour évoquer les habitants d’un village émus par la visite du sous-commandant Marcos. Comme le souligne Silvia Grijalba, l’objectif est de « révéler des aspects méconnus de la société actuelle ; d’offrir de nouveaux points de vue sur des événements historiques ; de sauver des héros enterrés par la mémoire sélective des vainqueurs de divers conflits […] »[34].
L’essor du documentaire à la fin des années 1990 et sa timide diffusion dans les cinémas espagnols ont permis à un cinéaste comme Manuel Martín Cuenca d’envisager de réaliser un premier film appartenant à ce genre, sans avoir aucun problème à se tourner ensuite vers la fiction. Si son œuvre est variée, un trait la caractérise cependant dans son ensemble : ce regard distancié, nostalgique et fasciné, expression de la vision du monde de la génération à laquelle il appartient et qui n’a pas pu être enthousiasmée par les idéaux utopiques qui ont exalté ses parents. Cette vision du monde comme un lointain paradis perdu, qui se révèle dans l’œuvre du réalisateur d’Almería depuis El juego de Cuba, son premier film, se traduit par une esthétique et un récit cinématographique aux caractéristiques spécifiques et contribue à l’unité de sa filmographie aux multiples facettes.
Traduction de l’espagnol : Véronique Pugibet (CRIMIC-Sorbonne Université)
[1] Cet article est une traduction légèrement remaniée du texte suivant: « El juego de Cuba : del Paraíso perdido al desencanto », in Berthier, Nancy, Fernández, Álvaro A., (coords), Ópera prima en el cine documental iberoamericano (1990-2010), Guadalajara, Universidad de Guadalajara, 2012, p. 181-202.
[2] Nous remercions Manuel Martín Cuenca pour la documentation qu’il nous a généreusement fournie pour ce texte (scénario, coupures de presse, dossier de presse).
[3] « Nommer c’est montrer, et montrer c’est changer », Jean-Paul. Sartre, Qu’est-ce que la littérature ? / Situations II [1948], Paris, Gallimard, Folio (coll.), 1985, p. 90.
[4] Pour une première approche de ces trois fonctions, voir Nancy Berthier, « Goya à Bordeaux de Carlos Saura et le biopic: entre tradition et renouvellement », Les langues néo-latines, numéro 336, décembre 2005, pp. 59-76 et – « Carlos Saura o el arte de heredar », Miradas sobre Pasado y Presente en el cine español (1990-2005), (Dir. Pietsie Feenstra, Hub Hermans), Rodopi, Amsterdam, 2008, p. 117-132.
[5] Dictionnaire théorique et critique du cinéma, Paris, Nathan, 2002, p. 56.
[6] La première du film a eu lieu le 23 novembre 2001 dans les cinémas Verdi de Barcelone et le 11 janvier 2002 dans les cinémas Verdi de Madrid.
[7] Manuel Martín Cuenca. Script, p. 41, «Apreciaciones del director», disponible sur: http://www.lalomablanca.com/pdf/guion_el_juego_de_cuba.pdf. Dernière consultation: 15/12/2011.
[8] Miguel A. Blanco Almería, « El Juego de Cuba de Manuel Martín Cuenca, première au festival de Malaga », Ideal, 8 juin 2001.
[9] Selon la productrice exécutive Belén Agosti, c’est au début de la production du film qu’ils ont entendu parler de ce match historique. « Nous devions le tourner et la production a commencé. Nous avons tourné le match à la Havane. Nous n’avions pas encore de scénario, mais nous avions ce moment en vidéo », Entretien avec Belén Agosti (Avidea S.L.), productrice exécutive de El juego de Cuba, Media. Magazine d’information du programme Media de l’UE, septembre 2001, p. 10.
[10] Manuel Martín Cuenca. Script, p. 41, “Apreciaciones del director”, disponible sur: http://www.lalomablanca.com/pdf/guion_el_juego_de_cuba.pdf . Dernière consultation: 15/12/2021.
[11] Manuel Martín Cuenca. Guión, p. 4, disponible sur:
http://www.lalomablanca.com/pdf/guion_el_juego_de_cuba.pdf . Dernière consultation : 15/12/2021.
[12] Synopsis du film inclus dans le Dossier de presse fourni par Manuel Martin Cuenca.
[13] Le fait de raconter l’histoire de la révolution cubaine du point de vue du baseball a permis d’une certaine manière une liberté qui n’aurait pas été possible s’il avait été envisagé de faire le film d’un point de vue ouvertement politique.
[14] La politisation des sports n’est pas propre au base-ball ni à Cuba, c’est un fait caractéristique du monde contemporain, même si elle adopte dans ce pays et ce contexte une forme spécifiquement exacerbée.
[15] Voir Jean-François Lyotard, La condition postmoderne: rapport sur le savoir, Éditions de Minuit, 1979.
[16] Cette partie, tournée en vidéo « qui permet l’utilisation de beaucoup de matériel et une grande mobilité », puis passée en 35 mm, Script, p. 42, « Appréciations du réalisateur », disponible sur : http://www.lalomablanca.com/pdf/guion_el_juego_de_cuba.pdf . Dernière consultation : 15/03/2021.
[17] Selon la définition d’André Gardies, Décrire à l’écran, Paris, Méridiens Klincksieck, 1999.
[18] Selon Noël Burch, c’est : « une utilisation très particulière du plan de coupe sous la forme d’une nature morte. […] La singularité de ces plans est qu’ils suspendent le flux diégétique, recourant à un registre considérable de stratégies et produisant une grande variété de relations complexes. Non sans hésitation, j’appellerai ces images « pillow-shots » par analogie grossière avec le « pillow-word » de la poésie japonaise classique ». Noël Burch, Pour un observateur lointain, Paris, Cahiers du cinéma, Gallimard, 1980, p.175.
[19] C’est la terminologie utilisée par José Moure dans Vers une esthétique du vide au cinéma, Paris, L’Harmattan, 1997.
[20] « Une partie du film sera tournée en 35 mm, plus stylisée. Des scènes spécifiques seront traitées avec un tournage très soigné. Ils seront utilisés pour les moments de transition ou pour les parties dans lesquelles le but est de condenser l’émotion visuellement ». Script, p. 42, « Commentaires du réalisateur », disponible sur http://www.lalomablanca.com/pdf/guion_el_juego_de_cuba.pdf . Dernière consultation : 15/12/2021.
[21] Yvette Biro, Le temps au cinéma, Lyon, Aléas éditeurs, 2007.
[22] Edición video Documentales Fnac, 2006.
[23] Cuando digo futuro, Silvio Rodríguez (1969):
Te convido a creerme / cuando digo “futuro”. / Si no crees mi palabra / cree en el brillo de un gesto, / cree en mi cuerpo/ cree en mis manos /que se acaban.
Te convido a creerme /cuando digo “futuro”/ Si no crees en mis ojos, /cree en la angustia de un grito/cree en la tierra,/cree en la lluvia,/cree en la savia./
Hay veinte mil buenas semillas/en el valle desde ayer/ Hay restos de desesperados, / hay el hombre y su mujer,/ Los hierros se fundieron ya / hay la paciencia y nada más.
[24] “Sé mucho que me costará / pero me resignaré / A mi orgullo le diré / Igual que a mi corazón /No siempre se va a ganar / Esta vez tocó perder”/
[25] Miguel Ángel Blanco “El juego de Cuba est l’histoire de la grande illusion, de ce qui aurait pu être” Entrevista de Manuel Martín Cuenca en Ideal, sección de Cultura, Viernes 8 de junio de 2001.
[26] « The generation after born after 1960, after you, after it all happened » Nancy Smith, cité par William Strauss, Neil Howe, Generations, The history of America’s future 1584 to 2069, New York, Harper Perennial, 1992.
[27] Idéal, section culture, vendredi 8 juin 2001. « Le film est l’histoire de la grande illusion de ce qui aurait pu être. Je ne juge pas, je pose les choses les unes après les autres ». C’est précisément cette dimension qui a plu à la productrice exécutive Belén Agosti pour Avidea. S. L. : « Il s’agissait également d’une histoire originale et d’une forme subtile de critique dans laquelle le spectateur tire ses propres conclusions, très différente des documentaires de dénonciation que nous avions l’habitude de réaliser », Entretien avec Belén Agosti (Avidea S.L.), productrice exécutive de El juego de Cuba, Media. Magazine d’information du programme Media de l’UE, septembre 2001, p. 10.
[28] En mars 1959, l’une des premières mesures culturelles de la révolution est la création de l’ICAIC (Instituto Cubano de Arte e Industria Cinematográfica), institution chargée de développer le cinéma dans le pays.
[29] Agnès Varda (Salut les Cubains, 1962), Chris Marker (Cuba sí, 1961), Armand Gatti (El otro Cristóbal, 1963), Mikail Kalatozov (Yo soy Cuba).
[30] Le DVD Ultimos testigos, édité par Morena Films, se compose de deux longs métrages documentaires, réalisés indépendamment mais « fondés sur le même concept » : celui de Manuel Martín Cuenca consacré à Santiago Carrillo et un autre sur Manuel Fraga Iribarne, autre grande figure politique de la Transition espagnole, réalisé par José Luis López-Linares.
[31] « La réalité sociale est toujours là, je dois faire des documentaires, continuer avec un pied dans la réalité et l’autre dans la fiction ». C’est ça le cinema, Ideal, section culture, vendredi 8 juin 2001.
[32] Inma Garrida “Cine documental: Asaltar la memoria”, Cinemanía, décembre 2001, p.115.
[33] Interview de Manuel Martín Cuenca : « Le film documentaire permet d’être beaucoup plus indépendant et de répondre aux besoins d’une partie du public qui veut qu’on lui raconte des histoires qu’il ne trouve pas dans d’autres films ou à la télévision. Un cinéma plus engagé que l’on avait peu à peu abandonné », « La luna de miel del cine documental », Silvia Grijalba, 31/12/2001, http:/www.elmundo.es/2001/12/31/cultura/1089161.html. Dernière consultation le 15/12/2011.
[34] Ibid.